L’enseignement inclusif signifie que tous les élèves apprennent ensemble dans le même environnement scolaire. Cela n’est toutefois pas toujours possible, par exemple en raison de déficiences ou de troubles de l’apprentissage. C’est pourquoi il existe l’enseignement dit spécialisé, par opposition à l’enseignement ordinaire. Mais de quoi s’agit-il exactement ? En quoi cet enseignement est-il spécialisé et en quoi consistent précisément les troubles de l’apprentissage ? Et quel lien a-t-il avec l’inclusion ? Nous avons mené l’enquête pour vous.

 

En Fédération Wallonie-Bruxelles, l’enseignement spécialisé s’adresse à des publics très différents et se subdivise en huit types selon les besoins des élèves. On distingue ainsi le type 1 pour les élèves présentant un retard mental léger, le type 2 pour les élèves présentant un retard mental modéré ou sévère, le type 3 en cas de troubles du comportement, le type 4 en cas de déficiences physiques, le type 5 pour les élèves malades ou convalescents, le type 6 en cas de déficiences visuelles, le type 7 en cas de déficiences auditives et enfin le type 8 pour les élèves présentant des troubles de l’apprentissage à savoir essentiellement les élèves présentant un trouble « dys » (1)

Le Pacte pour un enseignement d’excellence prévoyant que « le principe d’une démarche évolutive doit être à la base de l’organisation de l’école inclusive en FWB depuis l’enseignement maternel et jusqu’à la fin de la scolarité de l’enfant, en confirmant le droit de chaque élève d’être inscrit dans l’enseignement ordinaire, sans possibilité de refus d’inscription au motif que l’école nécessiterait des aménagements raisonnables ou que l’enfant ne serait pas capable d’assimiler la matière enseignée » (2) , tous les enfants présentant un trouble DYS devront être scolarisés dans l’enseignement ordinaire dès la rentrée prochaine, sauf cas strictement spécifiques et clairement définis nécessitant pour l’élève d’être scolarisé.e dans l’enseignement spécialisé. Le déploiement des aménagements raisonnables permettra de mener à bien ce but (3). Nous reviendrons spécifiquement sur les enfants présentant un trouble DYS et les aménagements raisonnables dans notre prochain article.

Il ressort de nos entretiens avec les professionnels de l’enseignement spécialisé que ceux-ci se voient précisément comme des spécialistes en accompagnement des troubles de l’apprentissage. Ne leur parlez pas d’élèves en situation de handicap mais d’« élèves présentant des troubles », toujours dans l’idée que la situation de handicap est la résultante de la rencontre entre l’individu et son environnement comme nous le mentionnions dans notre précédent article (4). L’élève présentant une déficience motrice n’éprouve en effet pas forcément de difficultés particulières dans les branches dites générales. C’est en éducation physique qu’il faudra aménager ses leçons. Les professionnels de l’enseignement spécialisé offrent donc un enseignement « différent » en adaptant leur manière d’enseigner aux besoins spécifiques de leurs élèves. Les élèves souffrant de déficience auditive ou visuelle sont par exemple confrontés à des difficultés qui leur sont propres mais celles-ci n’ont aucune incidence sur leurs capacités intellectuelles ou sur leur aptitude à apprendre (5). C’est grâce à la bienveillance, à la souplesse et à la créativité des équipes pédagogiques qui les encadrent que ces élèves surmonteront les difficultés qui leur sont propres.
L’idée est que ces enseignants font comme si leurs élèves étaient aptes à toutes les disciplines et au plus haut niveau, en faisant le pari qu’ils peuvent quand même y arriver. Pourquoi ? Parce qu’on ne sait jamais à quoi attribuer un échec et avoir la certitude que cet échec est imputable exclusivement au déficit d’une personne et non pas aux conditions éducatives de l’accompagnement qui lui a été proposé. (6)»

Dans l’optique de la rentrée prochaine et de la mise en place des pôles territoriaux (7) , il nous semble dès lors particulièrement intéressant de souligner un certain nombre de pratiques résolument inclusives (8)en place dans l’enseignement spécialisé.

Avant toute chose, pour parler des élèves ayant des besoins particuliers, il importe de mettre l’accent sur la personne et de ne pas la définir par son incapacité. On dira par exemple qu’un élève a une déficience auditive au lieu de le qualifier de « sourd » (9).

Ces enseignants travaillent en étroite collaboration avec une équipe globale composée notamment de MEI (10) , logopèdes et kinésithérapeutes et privilégient par exemple les ateliers autonomes lorsqu’une partie du groupe classe est prise en charge par l’un ou l’autre professionnel.

Les enseignants de l’enseignement spécialisé veillent également à appliquer en permanence un principe d’équité, agissant tantôt sur l’organisation de la classe et les modes de groupement, les méthodes et les stratégies d’enseignement ainsi que les adaptations des activités et des situations proposées, l’objectif étant de maintenir une exigence comparable au niveau de la compétence attendue, toute en abaissant le niveau des compétences déficitaires (11).

Enfin, s’ils différencient les exercices en fonction des aptitudes et difficultés de chacun.e, les enseignants de l’enseignement spécialisé accordent aussi une attention toute particulière à la cohésion de groupe, par exemple grâce à l’établissement début septembre d’une Charte de classe qui constituera l’élément fédérateur tout au long de l’année scolaire. Ils favorisent l’esprit d’équipe et l’apprentissage des habiletés sociales comme le partage de choix communs, le conseil et l’entraide entre des élèves différents (12).

Jour après jour, ils posent ainsi les jalons d’une société fondée sur la tolérance, l’inclusion et la justice sociale.

 

[1] http://www.enseignement.be/index.php?page=25191&navi=404#types,

[2] Avis n°3 du Pacte pour un enseignement d’excellence OS 4.3 : Répondre aux besoins spécifiques des élèves dans l’enseignement ordinaire, p 244

[3] https://ligue-enseignement.be/inclusion-scolaire-les-avancees-du-pacte-suffiront-elles/,

[4] Brun, Philippe et Mellier, Daniel (coll.), 12 interventions en psychologie du développement, DUNOD, 2019

[5] Hammeken, Peggy, Guide de l’inclusion scolaire : Répondre aux besoins de tous les élèves du primaire, Pirouette Éditions, 2013, p. 10

[6] Meirieu, Philippe, Le pari de l’éducabilité, Conférence à lENPJJ, 2008 sur https://www.meirieu.com/ARTICLES/educabilite.pdf, consultée le 30/04/2022

[7] http://www.enseignement.be/index.php?page=28585&navi=4908,

[8] À ce propos, nous recommandons vivement aux lecteurs la consultation de Duquette, Cheryll, Enseigner aux élèves ayant des besoins particuliers, Guide complet pour les accompagner vers la réussite, Pirouette Éditions, 2014

[9] Hammeken, Peggy, Guide de l’inclusion scolaire : Répondre aux besoins de tous les élèves du primaire, Pirouette Éditions, 2013, p. 10

[10] MEI : maître d’enseignement spécialisé, enseignant.e qui prend en charge les élèves individuellement ou par petits groupes pour travailler avec eux les notions qui ne seraient pas encore comprises ou acquises.

[11] André, Amaël, L’Inclusion pour changer l’école, La diversité en contexte scolaire, L’Harmattan, 2018, p. 34

[12 Idem, p. 60

[13] Pourquoi l’enseignement inclusif est important